vendredi 27 septembre 2013

(Panini Comics : Septembre 2013) Revue express de plein de magazines

Histoire de conclure Septembre sur du comics, laissez-moi vous proposer une rafale de recensions des différentes revues passées à travers les mailles de mon filet. Cela sera forcément plus court qu'à l'accoutumé et avec tout plein de commentaires ultrasubjectifs. Les nominés du jour dans la catégorie "Je chronique à l'arrache" sont donc : X-Men 3, X-Men Universe 3, Marvel Knights 10 et Ultimate Universe 9. 

X-MEN 3 


All New X-Men #6-7 : Brian Michael Bendis/David Marquez


Toujours le flagship de la revue, même si ces épisodes sont moins "marquants" que les précédents. Il faut dire que l'effet "waouou mais c'est une idée de fou !" s'estompe. Attention, hein, c'est toujours de très haute volée, parce que Bendis sait varier la tonalité de sa série. En l'occurrence, c'est le Cyclope originel qui est passé au crible, notamment via une longue discussion avec Raven. C'est très très plaisant, drôle aussi par moment. Marquez remplace un Immonen qui avait besoin de souffler, mais on garde de belles planches. 

Uncanny X-Men (vol 4) #3 : Brian Michael Bendis/Chris Bachalo


Encore une fois Bendis fournit un parfait dosage entre action/dialogues. On est au tout début du titre, mais le divin chauve enchaîne les twists. Si c'est mal orchestré, c'est le tournis garanti, mais quand c'est bien exécuté, ça donne envie d'en savoir plus. Retenez la seconde option pour ce numéro. Le premier affrontement entre ces Uncanny et les Avengers est plutôt bien mené, Magneto gagne encore en densité (s'il en avait besoin...), les gamins sont également attachants. Un petit bémol sur l'humour de Bendis. Parfois ça marche, mais quand on envisage des blagues potaches de collégiens pour celui qui est censé être le Malcolm X des mutants, mouais... 

Cable and the X-Force #4-5 : Denis Hopeless/Salvador Larroca


C'est la fin du premier arc pour cette nouvelle série Marvel NOW ! Il était temps parce que ça commençait à être longuet, d'autant qu'Hopeless compose des scripts plutôt complexes à suivre en alternant passé/présent avec une propension importante à l'outil elliptique. Mais soyons honnêtes, Cable and X-Force est une lecture rafraîchissante, et ce premier arc a rempli toutes ses fonctions. La première est de broder autour du thème mutant/humains/virus avec efficacité. Ensuite de rassembler un roster improbable mais ô combien attachant. Enfin, d'en faire non pas du black ops mais du mutant "gentil quoique délinquant", "gentil mais testostéroné". Je parlais plus haut d'humour, et bien là il est au rendez-vous. Je me suis bien poilé avec le duo Forge/Némésis, une sorte de duo de geeks complètement impayable. Hopeless est vraiment à l'aise avec son docteur, et en ferait presque la star de son casting. Toujours est-il que l'on va partir sous d'autres cieux le mois prochain, et j'ai envie de croire dans cette série qui confirme tout le bien que l'on peut penser de Hopeless. 

Bilan de la revue : toujours aussi incontournable, c'est la revue qu'il faut lire pour suivre les mutants. Pas de série vraiment faible, un ensemble de bonnes idées. Que du bonheur donc. 

X-MEN UNIVERSE 3  


X-Men (vol 4) #1 : Brian Wood/Olivier Coipel


Je n'attendais pas le titre comme le messie, mais presque. Et force est de constater que la série de Brian Wood s'impose d'emblée comme la plus solide de la revue. Si vous aviez suivi le volume précédent de X-Men, vous savez que Wood aime travailler les entités supérieures et/ou antérieures. Ce sera le cas pour ce premier arc, qui surprend surtout par son magnifique plan de conclusion. Beaucoup d'action pour ce casting 100% féminin que Wood connaît par coeur et manie donc avec aisance. En plus Coipel est là pour assurer le coup niveau illustration, donc pas de doute, c'est de la bonne came.

Uncanny X-Force (vol 2) #4 : Sam Humphries/Garney/Alphona


J'ai failli oublier X-Force au moment de chroniquer la revue. C'est dire si je ne suis pas convaincu par ce qu'a fait Humphries. C'est du sous-Remender, alors que l'écrivain a forcément les moyens d'amener la série sur de nouvelles pistes. Reste l'énigme Fantomex. C'est on ne peut plus Z comme idée, mais bon c'est le seul truc qui m'excite (un peu) à la lecture. En plus c'est pas très très beau. 

Astonishing X-Men : ?/?


Je me contrefiche de ces astonishing depuis pas mal de temps, et pour dire la vérité, j'ai sauté le numéro présent. Oups. 

Age of Apocalypse #9-10 : David Lapham/Roberto de la Torre


Les mois se suivent et se ressemblent avec le titre. On avance inexorablement vers la confrontation finale, et à chaque numéro, Lapham met l'accent sur un élément/personnage qui sera déterminant. Cette fois c'est Jean Grey qui est sous les feux de rampe, sans qu'on sache in fine pourquoi Prophet lui fait tant confiance, outre l'aspect charismatique et leadership. On se dit toujours qu'il faudrait penser à conclure tout ça, mais en même temps on s'y trouve bien dans cet univers. Cette fois c'est Daredevil qui est réinterprété, et bigre, Lapham est plutôt bon avec l'aveugle. Donc comme au mois précédent, wait and see, mais c'est pas mal du tout. 

Bilan de la revue : encore une fois XMU apparaît en difficulté. On ne sait pas trop ce qui manque, mais c'est sur qu'il y a un truc qui manque. Peut-être Shannah et Savage Wolverine. Je déconne, mais ça serait presque ça. Je pense quand même que le déséquilibre est trop grand avec X-Men, et que Wolverine and The X-Men aurait tout intérêt à rejoindre la revue. 

MARVEL KNIGHTS 10


Thunderbolts (vol 2) #2 : Daniel Way/Steve Dillon


A la base je ne suis pas fan de Daniel Way que je connais seulement pour son boulot sur Deadpool à l'humour vraiment pas terrible. Mais j'avoue être vraiment emballé par sa team de tous les héros les plus bad ass et borderline de l'univers Marvel. Avec ce deuxième épisode, la sauce prend vraiment bien avec un trip à la Expandables qui fait plaisir. C'est violent, ça s'assume comme tel et c'est jouissif. Franchement, vous attendiez autre chose de Thunderbolts ? Come on !! Bref le contrat est rempli, et je trouve en plus que Steve Dillon livre du bon boulot. Le gars se fait souvent démolir dans les reviews, mais moi j'aime bien. Surtout qu'on commence à le connaître son Punisher tout en rictus menaçant. Une autre bonne surprise de Marvel NOW, donc. 

Daredevil (vol 3) #17-18 : Mark Waid/Allred/Samnee


C'est toujours aussi bon. Cela devient redondant avec Waid de crier au génie, mais le gars c'est un peu le Lebron James du comics mainstream en ce moment, si vous me permettez cette comparaison. Bref, on pourrait croire qu'avec le #17 on part sur une nouvelle histoire de séparation entre Nelson et Matt. D'une part c'est toujours bien écrit, mais en plus le titre part sur une autre direction. Waid réintroduit la femme de Matt Murdock (souvenez-vous du run de Bendis) qui lui permet non seulement de titiller la fibre romantique et nostalgique du lecteur, mais aussi de travailler la folie douce qui menace notre héros. Bref, c'est excellent. 

Punisher (vol 9) #15-16 : Greg Rucka/Checcetto


Plus ça va, et plus je suis conquis par la vision que développe Rucka du Punisher. Très différent de la gaudriole version Ennis ou des délires pas toujours maîtrisés de Remender, ce Punisher est un retour au hard boiled de grande facture. Ce qui détonne dans cette série, c'est là cohérence dont fait preuve depuis le début Rucka en n'abandonnant aucun élément abordé depuis le premier épisode. L'écrivain a l'intelligence d'avoir compris que le Punisher est un point de fixation autour duquel tournent les autres personnages ou un roc immuable dans lequel ils s'encastrent. La relation avec le sergent Cole est passionnante, et la jeune veuve est à nouveau mise à contribution. J'avoue avoir été plus que surpris du déroulement des opérations et je suis curieux de voir comment l'écrivain va conclure son run. En plus, qu'est-ce que c'est beau sainte mère de Dieu ! Checcetto est une bonne pioche, et sa collaboration de longue durée contribue à identifier très rapidement la série. 

Winter Soldier #9 : Ed Brubaker/Michale Lark


Aussi étrange que cela puisse paraître, ce Winter Soldier est peut-être la série qui est un ton en dessous dans cette revue. C'est très très loin d'être mauvais. Le duo Brubaker/Lark a déjà fait ses preuves (Daredevil), le pitch est bon, l'action aussi. Mais la série ne me surprend plus et commence légèrement à me lasser. A suivre.

Bilan de la revue : en termes de qualité moyenne des séries, je pense que Marvel Knights doit être la meilleure revue de Panini. Il n'y a pas de titre en trop ou qui fait tâche. Du bonheur de lecture comme on en redemande tout le temps ! 



ULTIMATE UNIVERSE 9 



Ultimate Comics : Ultimates #17-18 : Sam Humphries/Luke Ross
Ultimate Comics : X-Men #17-18 : Brian Wood/Barberi/Padilla
Ultimate Comics : Spiderman #17-18 : Brian Michael Bendis/David Marquez/Larraz


Je ne vais pas trop me casser le bonnet pour cette critique. Sans être déplaisant, j'avoue avoir parfois lutté pour finir cette lecture. La conclusion du statu quo "divided we fall" est sympa, sans plus. La faute peut-être à des Ultimates trop axés sur la baston et des retournements de situation grossiers. La faute peut-être à des X-Men bien trop bavards et une Kitty Pride un brin agaçante. La faute peut-être à Spiderman qui est loin de son niveau habituel, guerre civile oblige. "United We Stand" c'est fini, et tant mieux. Vivement dans deux mois pour découvrir le nouveau souffle imaginé par la bande à Bendis. 


Les Dossiers d'Hellbazer : Pandemonium (Urban Comics)

Les Dossiers de Hellblazer : Pandemonium 


Contient Hellblazer Pandemonium (graphic novel) : Jamie Delano/Jock et Hellblazer #181 : Mike Carey/Jock

Quoi de tel qu’une bonne recension d’un Hellblazer alors que l’on vient d’apprendre que la chaîne américaine NBC annonce la mise en route d’une séries TV Constantine ? Vous pourriez rétorquer qu’on s’en fiche comme du slibard de votre conseiller général, et vous auriez raison car il est fort peu probable qu’une production télévisuelle grand public puisse capter toute l’énergie d’une série shootée à la subversion. Si encore HBO avait été choisie par la Warner, on aurait pu avoir un peu d’espoir… mais je m’égare. Après tout, ce qui nous intéresse, c’est que nos frenchies de chez Urban n’ont pas oublié notre Majax britannique. Même si l’éditeur n’a toujours pas décidé de lancer/relancer le chantier de Hellblazer comme il le fait pour d’autre bijoux de chez Vertigo, Urban nous balance des « dossiers » dont le présent Pandemonium est le deuxième opus. Un petit mot s’impose sur la place qu’occupe le recueil dans l’univers de la série. Prévu originellement pour l’année 2008, Vertigo attend 2010 pour publier le graphic novel. La date n’est pas anodine, puisque il s’agit de fêter les 25 ans de John Constantine depuis son apparition en 1985 dans les pages du Swamp Thing d’Alan Moore. Pour cette histoire, le mythique label fait les choses plutôt bien en rappelant rien moins que l’écrivain historique de Hellblazer en la personne de Jamie Delano. Cerise sur le gâteau, Jock, encore un britannique, rejoint l’aventure. Une valeur sûre (The Loosers) pour illustrer un script qui doit rentrer dans les annales.

L’histoire justement, que vaut-elle ? Les afficionados de Hellblazer savent que cette série c’est un petit peu comme du Simenon. La structure narrative est plus ou moins identique, mais le lecteur est toujours transporté par la variation des univers où le blondinet fout son bazar, et des dialogues percutants qui magnifient le cynisme grande gueule de notre héros. Comme par hasard, Pandemonium ne change pas trop la donne et l’on retrouve (avec plaisir) les passages obligés : la vision d’un Londres toujours changeant, Constantine qui se trouve dans la merde, qui enquête sur la menace du jour, qui se retrouve dans une merde encore plus sombre et par un Deux Ex Machina baise tous ses adversaires. Tout l’intérêt tient donc dans le contexte des aventures magiques : l’Irak, version occupée par la coalition Anglo-Américaine, pays dans lequel est dépêché Constantine, pour le coup manipulé dans le feutré par les services américains (et son entrejambe complice). Aucun intérêt à ce que je vous dévoile d’autres éléments sous peine d’inévitables et inutiles spoilers.

Il y a toujours un risque avec les comebacks ou les légendes du comics qui s’accrochent à une stature qu’ils ne justifient plus. Preuve en est avec Jim Sterlin qui se fourvoie sur son Stormwatch ou un Alan Moore en mode vieux con qui s’est mis à dos tous les talents du comics contemporain. C’est loin d’être le cas avec Pandemonium où l’on retrouve un Delano des grands jours. A la lecture des premières pages, l’esprit originel de Hellbazer réenchante notre tome cartonné comme si la patte de l’écrivain ne nous avait jamais quitté malgré les 20 ans de hiatus. Loin de moi l’idée de minimiser les runs d’Ennis, Azzarello, de Diggle ou de Carey, mais il y a ce petit quelque chose chez Delano qui vous chope à la gorge. En 1987, Hellblazer n’était pas seulement un comics trashouille sur la magie. Parallèlement l’écrivain britannique avait toujours distillé son regard corrosif sur la Grande-Bretagne version Thatcher, et les dégâts d’un changement de paradigme économique, comme si les forces démoniaques étaient décuplés par le chaos social de l’époque. Ce côté de témoin de son temps est toujours présent dans Pandemonium, ce qui tranche avec ce que font en même temps Diggle ou Milligan sur l’ongoing. Après tout, le sujet choisi (l’Irak, la guerre, l’occupation) s’y prête particulièrement. On connaît l’attrait de Vertigo pour la thématique martiale (cf les Scènes de Guerre d’Ennis, le Soldat Inconnu, Les Seigneurs de Bagdad), mais Delano lie magistralement le sujet avec Hellbazer. La guerre impérialiste a remplacé le libéralisme sauvage, mais apportent les mêmes effets. Les démons et autres divinités se repaissent des charniers et la désorganisation générale d’un pays laissé à l’abandon et où règne la terreur arbitraire. Entre le surnaturel et les innocents se dresse notre Constantine qui incarne plus que jamais une certaine éthique humaine (un comble pour cet égoïste invétéré) nécessaire pour survivre en contexte chaotique. On sent que Delano est écoeuré du monde qui l’entoure et se sert de l’anarchisme vengeur d’un Constantine à qui il laisse libre cours dans son final. Que le fan se rassure, les fondamentaux sont toujours là, mais Delano a mûri, son personnage aussi (il a 54 ans après tout).

J’ai peu de choses à dire sur le dessin de Jock, c’est très bien pour du Hellblazer. C’est en tout cas dans le ton des univers graphiques que l’on connaît chez Carey ou Milligan. Comme par hasard, Urban a décidé de rajouter en bonus l’épisode #181 de Hellblazer, scénarisé par ce même Carey et illustré par Jock. Difficile de comprendre ce que cet épisode vient faire dans le recueil. Le côté Champion’s League (match à l’extérieur/à domicile) ? Publier tout le travail de Jock sur la série ? Pas vraiment de cohérence puisque le #181 n’est pas tout à fait un one-shot et introduit les premiers éléments du grand plan de Carey pour son run, le premier arc (#175-180) ayant servi à rapatrier un Constantine exilé aux USA. On ne va pas s’en plaindre, mais on ne va pas non plus crier au génie éditorial.


Il n’empêche que Les Dossiers de Hellblazer : Pandemonium est un sublime album, et par voie de conséquence, incontournable pour le fan de la série ou le néophyte qui souhaiterait une bonne histoire qui se suffit à elle-même. L’ensemble est brillamment écrit, politiquement intelligent (loin d’un moralisme gauchisant hors de propos avec Constantine), et ténébreusement jouissif. Du pur Hellblazer qui démontre que devant papy Delano on s’agenouille et on dit merci. 

lundi 23 septembre 2013

Théâtre : J'ai tué Maurice Thorez les 4 et 5 octobre à Marseille

Parce qu'un peu de copinage ne fait pas de mal, et qu'en plus l'équipe artistique est talentueuse. 
Une des grandes réussites du Off d'Avignon de cette année débarque à nouveau à Marseille. Cerise sur le cargo, l'affiche du spectacle réalisée par Melchior Ascaride a été retenue parmi les dix plus belles affiches du festival. La classe non ? 



Les vendredi 4 et samedi 5 octobre à 20h30

au théâtre du Tétard
33, rue Ferrari
13005 Marseille
 

J'ai tué Maurice Thorez !
Tragédie comique contemporaine

de Gilles Ascaride

avec Gérard Andréani et Gilles Ascaride

Mise en scène de Serge Valletti

Renseignement et réservation: 04 91 47 39 93
Possibilité de restauration sur place

Plein Tarif 13 €/ tarif réduit 8€

Si vous êtes fan du texte, sachez que vous pourrez vous le procurer aux éditions du Fioupélan chez votre libraire préféré. En tout cas, il trône chez Préambule. 

A très bientôt !! 

Kumudini, de Rabindranath Tagore

A l’occasion de la célébration du centenaire de l’attribution du premier prix nobel de littérature à un écrivain indien en la personne de Rabindranath Tagore, Zulma met fin à une curieuse omission éditoriale en publiant Kumudini. Si le roman paraît originellement en 1929, la traduction anglaise advient seulement en 2003, ce qui est presque un comble eut égard à son statut de classique de la littérature indienne. Désormais, c’est au tour du lectorat français de profiter d’un texte qui aura tout de même transpercé huit décennies.

Le sujet de Kumudini se distingue avant tout par son classicisme maîtrisé. Point de Bhagavad-Gita revisitée ou de saga épique, Tagore emmène le lecteur dans l’ambiance plus satinée et discrète des alcôves du Bengale. Tout part d’un mariage entre deux nobles lignées, vécu du côté du marié, riche négociant de Calcutta, comme une revanche jouissive sur le destin puisqu’il s’accapare le plus beau joyau de ses antiques rivaux. Pour la jeune Kumudini, ce mariage qui sauve sa famille d’une ruine assurée, est pour autant interprété comme un signe des dieux, un véritable baiser de Krishna qui embrase son âme. Mais sitôt passé le seuil de la demeure conjugale, la douce promenade sur le dharma se transforme progressivement en calvaire. Face à l’autorité et l’intransigeance d’un homme incapable d’exprimer ses sentiments, Kumudini ne peut opposer qu’une fierté obstinée et sa dévotion indéfectible dans les divinités protectrices. Cette posture de sainte est pourtant soumise à de rudes preuves tant les frustrations, déceptions, mesquineries ou autres humiliations se succèdent pour devenir la routine d’une prison déguisée en palais.  

 Outre son intrigue bien ficelée autour de ce huis clos émotionnel, Kumudini justifie pleinement de se plonger dans l’univers de Tagore. Voilà un roman qui enjoint au décentrement culturel et qui agit comme un vaccin à tout ethnocentrisme littéraire. Pour reprendre le vocabulaire du sociologue Alain Touraine, ce texte est la parfaite illustration en littérature de la thèse « un feu de la modernité pour plusieurs âtres de modernisations ». Car de modernité, il en est bien question dans le roman. A l’instar de nos Balzac et autres Zola, Tagore s’applique à étudier en arrière-plan de son mélodrame, les conséquences des changements sociaux et économiques sur les pratiques culturelles de son pays. Ramené au contexte indien, Kumudini est le théâtre de l’affrontement dialectique entre la caste et les nouvelles classes, mais aussi entre les superstitions traditionnelles et les aspirations d’individus (notamment de femmes) qui s’affirment en tant que tels. C’est tout l’intérêt de la dualité entre l’époux, dont le mérite l’a propulsé à sa situation de rajah,  et son l’épouse, dont la dignité est l’unique vestige d’une noblesse de sang déchue. Tagore se révèle ainsi comme écrivain de l’incorporation puisque chacun des gestes, des emballements ou des attitudes des personnages trahit leur origine sociale, en tout cas un rapport particulier à l’Argent, nouvelle divinité supplantant le vieux panthéon indou.   

Il n’est point d’en rajouter pour se convaincre de l’intérêt de Kumudini, révélateur d’une littérature indienne qui, au-delà du ballet de saris et autres bijoux multicolores, cerne avec acuité les mutations sociales dont elle est témoin. Un propos méta-textuel qui rappelle la stature de Rabindranath Tagore dans le cénacle des grands écrivains. Une nouvelle audace de la maison Zulma qu’il serait dommage d’ignorer.   

Kumudini, de Rabindranath Tagore, traduit du bengali (Inde) par France Battacharya, éditions Zulma, paru le 03 octobre 2013, 400 pages, 22 euros. 




Rencontre autour de la vigne, le samedi 28 septembre

"Recettes de ma vigne" ... au Bar du XXème siècle

avec la librairie Préambule
le samedi 28 septembre - à partir de 18 h.

Rencontre - dédicace - dégustation dans le cadre des "Vendanges étoilées" avec Anne-Sophie Thérond et Catherine Bernard autour du livre "Recettes de ma vigne"

Explorer les différentes possibilités culinaires qu'offre la vigne, c'est l'idée qui a réuni Catherine Bernard, vigneronne, et Anne-Sophie Thérond, rédactrice culinaire et chroniqueuse gastronomique. Car la vigne est pleine de ressources : le vin bien sûr, le raisin évidemment, mais aussi les vrilles, les fleurs, la lie, les sarments... 
Elles ont donc imaginé, expérimenté et goûté près de 40 recettes pour présenter toutes les associations possibles entre la cuisine et la vigne.

Images intégrées 1


Un livre original, permettant aux amoureux de la vigne de tout cuisiner dans leur plante préférée : sarments (grillades aux sarments de la vigne), feuilles (oiselets rôtis en feuille de vigne), fleurs (salade cueillette des vignes), le raisin en lui-même (salade parfum d'automne, foie au raisin, clafoutis aux amandes et raisins, blettes aux raisins et aux pignons, pain aux raisins), le marc (fromage de chèvre au marc de raisin, saucisson au marc) et enfin/surtout le vin (coq au vin, daube du sud, œufs en meurette, sauce bordelaise, poires au vin, sabayon, gelée de vin, granité de vin doux), tout y passe.

A cette occasion, Bruno, le chef du XXe, adaptera trois recettes du livre :
- Foie au raisin : une version avec des foies non gras, accompagnés de raisin (grain, vinaigre, vin)...
- Ajo blanco : cette soupe froide d'été vient d'Espagne. Sous son nom d'ail blanc, amandes et raisins se combinent sur le principe du gaspacho...
- Truites fumées aux sarments de vigne...  no comment !!!

et pour en savoir plus...

RENDEZ-VOUS LE SAMEDI 28 SEPTEMBRE - 18H - au Bar du XXème siècle

Nous vous attendons nombreux
Préambulement votre

mardi 17 septembre 2013

Panini Comics (Septembre 2013) : Iron Man 3, Age of Ultron 1

Suite de nos critiques mensuelles des revues Panini avec Iron Man, et en vedette, le nouvel event de Marvel : Age of Ultron.

IRON MAN 3


Iron Man (vol 5) #4-5 : Kieron Gillen/Greg Land

C’est encore double dose ce mois-ci pour l’homme de fer. Kieron Gillen clôture son arc sur le programme Extremis. Depuis deux numéros Tony Stark est en goguette pour récupérer le dit-programme et régler son compte aux spécimens humains infectés. Comme il l’annonce lui-même, si des psychopathes du calibre de Fatalis ou Crâne Rouge mettaient la main sur Extremis, autant leur couper l’herbe sous le pied. Ces épisodes qui s’apprécient comme des one-shots sont autant de variations d’ambiances et de contextes pour notre écrivain sautillant. Si vous aimez les catacombes et Lovecraft, le #4 est fait pour vous. Si vous ne jurez que par les intrigues d’astronautes, vous aimerez le #5. Mais si vous n’êtes pas emballé par ce que fait Gillen sur Iron Man (comme moi), vous risquez de sévèrement vous ennuyer. Au contraire de Young Avengers, je trouve que l’humour de l’écrivain sur Iron Man tombe souvent à plat. Idem pour la caractérisation de Stark en milliardaire égocentrique et irresponsable, qui pourrait être dans le ton si Gillen ne donnait dans l’outrance et le surjeu perpétuel. Personnellement, la succession de fanfaronnades m’agace d’autant que l’action se fait rare. Ce n’est pas en empilant les pires clichés et les types d’armures que l’on va me convertir au personnage. Seul l’ouverture finale me fait espérer en un futur, sinon radieux, au moins original (et raccord avec le reste du magazine) pour le titre. Niveau artistique, je serai tout aussi sévère avec le travail de Greg Land. Quand le bourrinage mecha brille par son absence chez Iron Man, qu’est ce qu’il nous reste ? Une version métrosexuelle tout en sourire bright de Tony Stark. Autant dire que c’est largement insatisfaisant.

Guardians of the Galaxy (vol 3) #2 : Brian Michael Bendis/Steve McNiven/Sarah Pichelli

 C’est un des transferts de l’année dans le championnat Marvel NOW, mais le moins que l’on puisse c’est que l’équipe des Gardiens de la Galaxie ne va pas se plaindre de l’arrivée de la star Bendis. La nouvelle direction prise est toujours aussi intéressante et ce n’est pas ce nouvel épisode qui frise la perfection qui va me démentir. Si l’action démesurée faisait la force du cosmique des Giffen, Abnett et Lanning, Bendis a décidé d’affiner le monde impitoyable de la galaxie. Que le lecteur se rassure, l’action domine toujours dans la série et l’on dévore littéralement l’affrontement des GOG et des forces d’invasion Badoon. Le découpage est parfait, le rythme est trépidant, les dialogues savoureux. Mais là où l’épisode marque indéniablement des points, c’est dans la description des enjeux intergalactiques. Il restait quelque part une zone d’ombre dans la continuité Marvel, à savoir pourquoi toutes les races et autres entités peuplant l’univers en veulent autant à notre planète. Ce géocentrisme a d’autant plus de quoi surprendre alors que la Terre est toujours divisée et ne constitue pas en soi une menace impérialiste a contrario des Kree et autres Shi’ar. C’est un petit peu le sujet de la réunion que convoque le roi de Spartax. Les réponses que donnent alors Bendis sont satisfaisantes en appuyant sur le caractère chaotique, imprévisible, perturbateur de la race humaine. Conséquence : loi spatiale de neutralité sur la Terre qui devient une zone de non-intervention. Un statu quo qui ne saurait toutefois guère durer, que ce soit au regard des ambitions des grands peuples cités ou encore des propres actions de nos Gardiens toujours aussi réfractaires à l’autorité, fût-elle interstellaire. Tout ceci est donc de très bon augure pour le futur de la série. Si en plus McNiven et Pichelli se surpassent au dessin, on s’incline et on profite à fond de cette nouvelle version du cosmique.

Nova (vol 5) #3 : Jeph Loeb/Ed McGuiness

Preuve que le cosmique se porte bien chez Marvel, Nova continue sur sa très bonne lancée, et l’on prend toujours autant de plaisir à suivre le jeune Samuel qui découvre ses nouveaux pouvoirs. Si l’on a l’âme pinailleuse, on pourrait dire que Jeph Loeb n’est pas très original et enquille les passages obligés. Mais si l’on est honnête, il faut avouer qu’il s’en sort à merveille. Au menu de ce numéro : une scène très amusante entre Nova et le Gardien (dont on apprend qu’il peut sourire, ce n’est pas rien), mais aussi un entraînement musclé avec Rocket Racoon et Gamorra, et une première mission spatiale pas piquée des hannetons qui se conclut sur un cliffangher qui a de quoi faire frémir. Loeb est toujours aussi à l’aise pour se mettre dans la peau d’un adolescent et concocte ce même coktail gagnant entre innocence de la jeunesse et sérieux des enjeux exposés. Rien à dire non plus sur son vieux compère aux dessins, sinon que McGuiness est très inspiré et parvient à nous faire décoller aux côtés de Nova. Mission accomplie donc.

Fantastic Four (vol 4) #3 : Matt Fraction/Mark Bagley

Matt Fraction a décidé d’enlever le frein à main et envoie enfin la famille Richards dans l’espace. L’ensemble du numéro est donc consacrée à la première aventure temporelle des 4 Fantastiques. Ce n’est pas désagréable, l’idée de planète-leurre est plutôt bonne, l’action est au rendez-vous, l’imagerie des pionniers est bien retranscrite, bref on ne baille pas trop à la lecture, ce qui serait presque un exploit vu les standards fractioniens. Par contre difficile de se prononcer sur la qualité globale de l’arc vu qu’il faudra attendre un bon paquet de revues avant d’avoir une idée plus objective sur la vision de l’écrivain. Aux dessins, Mark Bagley fait le job, ni plus ni moins, c’est pas mal sans être transcendant.

Bilan de la revue : mon constat est peu ou prou le même que le mois dernier. Iron Man m’énerve, les deux séries cosmiques me passionnent. Reste les Fantastic Four, à mon avis le facteur X de cette revue.


AGE OF ULTRON 1


Drôle de destinée qu’aura connue ce nouvel event Marvel. Arrivé sur la pointe des pieds, teasé par le bout des doigts comme si l’éditeur américain avait honte de son blockbuster, misant plutôt sur l’estival Infinity, Age of Ultron ne partait donc pas sous les meilleurs auspices. Il faut aussi resituer la conception d’Age of Ultron, annoncé quelques mois après le lancement de Marvel NOW sans clairement se positionner dans la continuité puisqu’aucune série estampillée NOW n’avait sinon préparé, du moins fait office de prologue. Des symptômes inquiétants puisque Marvel nous avait jusqu’ici habitué à la grande pompe promotionnelle. Pourtant sur le papier, rien que l’équipe annoncée a de quoi faire frémir. Vieux routier de l’event, c’est Bendis qui est à la manœuvre. Rien d’extraordinaire a priori, mais au moment où Age of Ultron sort, l’écrivain chauve est au sommet de son art et toutes (je dis bien toutes) ses séries du moment sont des hits (Ultimate Spiderman, Uncanny X-Men, All-New X-Men et Guardian of the Galaxy). Mais surtout, c’est le retour aux grandes affaires d’un Bryan Hitch qui se faisait depuis quelques temps désirer. On ne peut pas dire que le génial dessinateur se soit trop foulé lors de ses dernières collaborations faisant donc d’Age of Ultron  le coup de fouet dont il avait besoin.
Je vous épargnerai un long discours sur les events, qui ont surtout le don de décevoir un lectorat qui attend peut-être trop de ces grandes productions. Rappelons donc simplement que ce type de récit doit rompre avec la routine super-héroïque et vous en mettre plein la tronche le temps d’une histoire qui sort du commun. Vérifions donc si Age of Ultron remplit (le début de) son contrat.

Age of Ultron #1 : Brian Michael Bendis/Bryan Hitch

Point de suspense superflu, Bendis signe à mon avis un premier numéro qui tutoie la perfection. Dès la première double-page l’ambiance d’Age of Ultron est posée. La vue panoramique sur des immeubles en ruine surplombé par les réacteurs d’un immense vaisseau spatial agit comme une immersion immédiate dans l’univers post-apocalyptique de l’event. Pour ceux qui s’intéressent aux séries mutantes, le genre du post-apocalyptique sur fond de résistance à une autorité totalitaire et oppressante n’est pas si originale. Remender avait ramené X-Force dans l’âge d’Apocalypse, dont Lapham avait tiré un spin-off du même nom. Cependant Bendis prend à contre-pied le script et le style de Remender et se situe dans un registre auquel il ne nous avait guère habitués. Dans ses plus grands runs (citons notamment Daredevil, Ultimate Spiderman), l’écrivain s’impose par un art magistral du dialogue par lequel il travaille en profondeur les personnages qu’il aime. Selon les standards de Bendis, ce premier numéro est finalement peu bavard et la plupart des lignes de dialogues tiennent plus du cri, d’une extériorisation émotionnelle bien loin des discours léchés qu’il affectionne tant. Bendis fait ainsi entièrement confiance aux images qu’il invoque et à la puissance symbolique qui s’en dégage. Les moments de bravoure s’imposent à nos yeux, que ce soit cette incroyable séquence de sauvetage de Spiderman, l’arrivée de l’armée d’Ultron tels les anges noirs semant destruction et désespoir. Que dire de cette image bouleversante qui clôture le #1 et qui démontre qu’un plan bien pensé peut aisément supplanter la meilleure des argumentations. Si je vante à ce point l’impact visuel de l’épisode, c’est que l’artistique est à un très haut niveau. Oui, réjouissons-nous du retour de Bryan Hitch. Certes, cela n’atteint pas les plus belles pages d’Ultimates, voire de The Authority (à supposer qu’Hitch retrouve un jour ce niveau), mais dieu que cela reste beau et sombre. Que ce soit dans les paysages décharnés ou dans les corps maltraités de nos héros, le dessinateur est inspiré, cela se sent et impacte le plaisir de lecture.

Age of Ultron #2 : Brian Michael Bendis/Bryan Hitch

Après une telle introduction, la suite risque forcément de décevoir. S’il n’atteint pas la même intensité (mais peut-il en être autrement), cet épisode reste toutefois d’excellente facture. Bendis poursuit plusieurs pistes, qui sont payantes. Tout d’abord il insiste sur un duo de survivants en la personne de Black Widow et Moon Knight. En investissant une ancienne planque de Nick Fury, l’écrivain assure ainsi un passage de témoin symbolique qui est bien pensé, tout en contrepoint de la bad ass attitude d’un  Hawkeye particulièrement jouissif. Il faut d’ailleurs constater que dans Age of Ultron, Bendis met en avant ses personnages préférés, à savoir les héros urbains généralement dénués de très (trop) grands pouvoirs, et qui sont in fine les meilleurs représentations du courage et du dépassement de soi, en somme les avatars les plus crédibles de la résistance humaine. L’event se déplace ensuite dans l’underground New-Yorkais autour du debriefing de Spiderman. L’artifice narratif est là encore efficace puisqu’il permet de faire assez rapidement le lien entre la continuité de Marvel NOW et Age of Ultron et de comprendre comment on en est arrivé là. Un petit mot sur la conclusion de ce #2, qui répond directement à celle du #1. Renversement d’image et donc de symbolique, qui paradoxalement arrive peut-être un peu trop vite. Les blessures physiques ou mentales auraient pu perdurer un poil plus longtemps pour souligner l’atterrement ou le découragement de certains personnages suite au soulèvement de la Machine. Un petit mot sur la livrée de Bryan Hitch. Dans la lignée du premier numéro, cela reste beau, avec de très belles pages, en particulier ce panorama qui magnifie la première offensive d’Ultron sur Manhattan.  


Bilan de la revue : après deux numéros pour le moins réussis, je ne peux que conseiller la lecture d’Age of Ultron. Voilà un event qui pour l’instant séduit par son ambiance doucement désespérée, le choix des héros mis en avant, et les promesses que l’on est désormais en droit d’attendre. Ah, si seulement on pouvait avoir plus de pages pour 4,10 euros… 

dimanche 15 septembre 2013

Panini Comics (Septembre 2013) : Uncanny Avengers 4, Avengers Universe 3, Avengers 3

Ayant un peu croulé sur les lectures et autres tâches annexes, j’ai donc pris un certain retard sur mon planning habituel. Mais je vais essayer malgré tout de vous proposer le traditionnel bilan des publications Marvel NOW ! que je lis chez Panini. Sans plus attendre, place aux séries Avengers.

UNCANNY AVENGERS 4
 

Uncanny Avengers #4 : Rick Remender/John Cassaday
 

           Voilà une série qui ne dévie pas d’un iota depuis son lancement. On garde dans ce même numéro qui font le succès (ou son contraire, selon votre appréciation) de cette série. Remender conclut cette fois-ci l’affrontement entre les C-Men et l’équipe mixte dirigée par Havok. Beaucoup d’action au rendez-vous et l’on saura rendre grâce à l’écrivain  de mettre à l’honneur la Sorcière Rouge et le frère Summers, tant les poids lourds habituels (Captain, Wolverine, Thor) n’ont jusqu’ici guère brillé. Une manière plutôt efficace de remettre en selle des personnages qui en avaient bien besoin, notamment une Wanda dont la réputation n’est guère reluisante. On pourra rétorquer que ce premier arc n’est guère original, et que Remender se permet certains écarts (et ouais, faut pas oublier que le bonhomme avait pondu FrankenCastle), mais honnêtement, le mélange prend bien. Sans compter un bon vieux cliffangher des familles pour maintenir en haleine son lecteur. Je serais ce mois-ci un peu moins élogieux vis-à-vis de Cassaday, dont j’ai eu du mal à reconnaître le trait. C’est moins détaillé qu’à l’accoutumée, notamment pour les visages. Mais bon, ça tient quand même la route.

Avengers Arena #4 : Dennis Hopeless/Alessandro Vitti


Nous voilà de retour dans l’univers survivaliste et légèrement désespéré d’Avengers Arena. Dans la lignée des deux précédents numéros, Hopeless se concentre ici sur un couple de personnages, rappelle leurs origines pour mieux les situer dans la présente intrigue. Si le schéma devient légèrement répétitif, ce travail de contextualisation est bougrement bien pensé et permet de rappeler efficacement le background de personnages (parfois) inconnus pour le lecteur, tout en variant les angles de perception et donc les modalités de narration du récit. En se concentrant dans cet épisode sur le couple Chase/Nico, Hopeless change légèrement de ton, optant pour une ironie réjouissante. Pourtant l’humour noir ne tient que sur quelques pages, puisque la rencontre avec le trio Hazmat/Reptile/X-23 fait rapidement basculer le récit dans la défiance, l’incompréhension et la défiance, somme toute, les ingrédients propres à la série. Difficile par contre de se prononcer sur l’avancée d’un récit qui joue beaucoup sur l’ellipse ou le non-dit. Gageons que la conclusion du numéro sera synonyme d’accélération d’une intrigue qui reste pour l’instant extrêmement intéressante. Aux dessins il y a du changement ce mois-ci avec l’arrivée d’Alessandro Vitti, qui remplace Kev Walker. Son trait me rappelle par moment Jim Cheung. Cela n’est pas vilain, loin de là (d’autant que la colorisation reste au top), mais je préfère son prédécesseur.

A+X #4 : Kaare Andrews/Lee Loughridge puis Jason Latour/David Lopez


Nul besoin de vous répéter tout le mal que je pense de ce projet A+X, pensés comme la réunion d’un casting all-star que ce soit dans les héros mis en avant dans les histoires, mais aussi au niveau des équipes artistiques mobilisés. Pour ce dernier point, soit mon inculture est grande (et c’est possible), soit Marvel est en train de faire appel à des équipes de seconde zone (avec tout le respect que je dois pour Andrews, Loughridge, Latour et Lopez) pour faire perdurer le concept. Et pourtant, on y gagnerait presque en qualité, ce qui est relativement paradoxal. Je passe allègrement sur le récit qui réunit le fauve et Spiderman dans une dimension parallèle dominée par une espèce descendante du fauve. Libidineux et faussement drôle, j’ai trouvé le résultat globalement raté. Par contre l’histoire concoctée par Latour est plus intéressante. D’une part parce que le team-up du jour décontenance (Quentin Quire et Captain America !)  et surtout parce l’écrivain reste fidèle à la caractérisation des deux personnages tout en respectant leurs continuités respectives. Cela reste toujours anecdotique, mais c’est le genre de récit que l’on pourrait rajouter dans un TP pour appuyer l’évolution d’un personnage. Une lecture très agréable (pour une fois).

Bilan de la revue : mon ressenti est sensiblement identique à celui du mois précédent. Uncanny reste efficace, Arena est toujours aussi bon et haletant. Reste A+X, légèrement sauvé par son deuxième récit. La bonne nouvelle du jour, c’est que justement on n’aura pas d’A+X dans le prochain numéro. Ah et l’autre bonne nouvelle, c’est que mon courrier a été publié par Jérémy Manesse. Quelque part, c’est la classe.

AVENGERS UNIVERSE 3
 

Avengers Assemble #11-12 : Kelly Sue DeConnick/Stefano Caselli/Pete Woods


Double dose d’Avengers Assemble (ouuuaaaaisss……) ce mois-ci. J’en ai marre de me répéter à chaque revue, mais il faut dire aussi que j’en ai marre de lire cette série. Entre DeConnick et Fraction, on ne peut vraiment pas dire que je sois fan de ce couple, quoique pour des raisons très différentes. La compagne de l’auteur de Fear Itself, continue, numéro après numéro, de traiter par-dessus la jambe son histoire, son équipe et ses personnages. Dans le #11 elle conclut (enfin) son arc sans intérêt sur une arme biochimique (ou bactériologique, je m’en souviens déjà plus). Pif paf pouf, les héros gagnent, et sur quoi ça se termine ? Sur Spidey qui photographie Hulk et Stark qui défilent à poil dans New-York. Franchement, comment voulez-vous que je souscrive à ça. Je suis pourtant fan d’humour régressif (un bon pipi-caca de temps en temps, ça ne fait pas de mal), mais il faut que ce soit un minimum cohérent. Ce sera quoi la prochaine fois, Captain qui s’amuse avec un coussin péteur ? Bon, j’ai même pas envie de vous parler du #12, autour d’une intrigue toujours aussi passionnante autour de Black Widow et de la Sibérie. Hawkeye et Spider Woman sont embarqués, mais franchement on s’en cogne. Et le pire avec Avengers Assemble, c’est que Marvel y alloue de sacrés dessinateurs ! Que soit Caselli ou Woods je trouve qu’on en prend plein les mirettes, mais ça n’empêche pas de constater que ce qu’on lit reste indigent.

Captain America #3 : Rick Remender/John Romita Jr


Alors tout de suite on change de dimension (ehehe). Remender sort rapidement Captain de la mélasse dans laquelle il se trouvait à la conclusion du numéro précédent. L’écrivain pose plutôt son récit ce mois-ci, continue d’alterner entre le passé de Rogers et ses péripéties actuelles, tout en rajoutant de nouvelles pistes. L’ensemble reste toujours mystérieux (mais où allons-nous dans ce récit ?) tout en gardant son côté hypnotique. Captain est toujours autant maltraité quand bien même il s’érigerait en libérateur, et en proie cette-fois à de grands doutes existentiels. L’épisode se lit donc plutôt bien, mais surprend encore par son cliffangher que je n’ai absolument pas vu venir. J’aurais donc les mêmes remarques qu’avec Uncanny Avengers, Remender nous la joue de plus en plus FrankenCastle. Je reste circonspect, mais confiant dans les capacités de l’écrivain de nous livrer une suite de grande facture. Avec Romita Jr, c’est le chaud et le froid, le beau et le franchement moche. Pendant de nombreuses cases, le dessinateur est en forme (j’aime beaucoup ses gros plans de Captain), et par moment ça pique les yeux. Cette fois-ci, Romita Jr en veut aux proportions humaines, et a décidé de faire de ses gamins des héros à la Final Fantasy VII. Autant dire que le SD est plutôt WTF.

Indestructible Hulk #3 : Mark Waid/Leinil Francis Yu


Le boulot de Mark Waid ne cesse de m’enthousiasmer sur la version Marvel NOW de Hulk. Un vent de fraîcheur ne cesse de souffler sur le titre, et franchement cela fait du bien. Rappelons le pitch de ce nouveau virage dans la trajectoire du géant vert : le SHIELD finance le laboratoire de Bruce Banner, tandis que Hulk rend à l’agence quelques services. Dans le présent épisode ces deux facettes sont merveilleusement agencées. Une bonne partie est ainsi dédiée au recrutement par l’agent Hill des futurs laborantins. Tout en faisant avancer son histoire, Waid remet Banner sur son piédestal légitime en rappelant que si les plus grands esprits de la planète sont prêts à évoluer sous ses ordres, c’est que Bruce est une véritable Star dans sa communauté. J’attends donc beaucoup des futurs développements de cet aspect-là (mais bon en ce moment Waid c’est 100 % de capital confiance sur le superhéroïque). Quant à la deuxième facette, elle est toujours présente, et on n’est pas déçu non plus. Non seulement l’intrigue est bien ficelée, mais quand Hulk débarque ça fait mal. C’est à se demander si Waid ne doit pas procéder à un léger power up de ses vilains, car l’AIM n’est clairement pas du calibre de notre héros. Je vais rester tout autant élogieux avec Yu. Je suis littéralement conquis par son trait. Ce qui était un des principaux défauts du run de Aaron, est ici une des forces du titre. On ressent bien, même si le dessinateur joue allègrement avec la perspective, tout le côté titanesque du héros, ce qui est un des intérêts majeurs d’une série Hulk. Franchement c’est le sans-faute.

Thor God of Thunder #3 : Jason Aaron/Esad Ribic


Là aussi on frise la perfection. Je redécouvre avec toujours autant de plaisir cette série qui envoie du très très lourd. Au programme dans ce numéro, toujours cette triple temporalité autour de Thor et du tueur de Dieux. Le numéro se concentre plutôt sur l’enquête que mène l’asgardien dans le présent, tandis que l’on s’approche de plus en plus de la confrontation entre les deux immortels qui a eu lieu dans le passé. Rien n’est à jeter, que ce soit au niveau de l’ambiance, des dialogues ou de l’action. Je ne suis pas un grand connaisseur de Thor, mais Aaron rompt clairement avec la caractérisation du dieu comme une sorte de Lassie chien fidèle modèle de Luxe. Cet arc explore les failles des Dieux, leurs peurs, leurs faiblesses et leurs échecs. L’atmosphère est tour à tour oppressante, épique, introspective ou nostalgique. Bref, tout le panel y passe et montre tout le talent de Jason Aaron qui signe, à mon avis, son meilleur travail chez Marvel. Esad Ribic est comme d’habitude au diapason du scénario et signe des planches à vous décrocher la mâchoire, d’autant plus que le script d’Aaron s’y prête admirablement : Dieux cloués à un arbre géant, Royaume spatial, Divinité géante, Bibliothèque du Panthéon, autant de visions sublimés par le dessinateur.

Bilan de la revue : on est dans la lignée des mois précédents. Avengers Assemble est en trop, mais les séries solo rehaussent le niveau. Si on est en droit d’attendre un peu plus de Remender sur Captain America, Waid et Aaron touchent la perfection sur leurs titres respectifs.

AVENGERS 3


Avengers (vol 5)  #5-6 : Jonathan Hickman /Adam Kubert


La revue s’ouvre sur la traditionnelle double dose d’Avengers. Non pas que je le regrette car j’avoue souscrire avec plaisir à la vision que propose Hickman de l’équipe star made in Marvel. Après un premier arc en fanfare se déroulant sur Mars, l’écrivain prend depuis son temps, que ce soit dans la présentation d’un concept Avengers élargi ou dans la construction de son intrigue. Quiconque n’est pas coutumier du rythme narratif hickmanien aura l’impression de parfois s’ennuyer ou de faire du surplace, mais finalement se rendra compte que chaque élément avancé prendra son importance .  En regardant de plus près les deux épisodes du jour, le premier s’intéresse à la nouvelle titulaire du costume Smasher. Une bonne occasion de retrouver l’élite cosmique avec la Garde Impériale Shi’ar. Le récit de l’intégration du premier membre terrien est plutôt efficace et l’on s’attache assez rapidement à cet Avengers atypique. Dans le #6, on revient à ce qui intéresse Hickman, soit la grande menace cosmique qui impactera la Terre. L’écrivain développe un petit plus l’avatar de l’univers, et au détour de grandes sentences dramatiques, fait doucement, mais sûrement monter la sauce. Je trouve que cette nouvelle atmosphère est plutôt prenante et convaincante, et ferait même pardonner certaines lacunes d’écriture (l’alphabet alien ou l’humour de Spiderman qui tombe souvent à plat). Au niveau des dessins, je trouve que Kubert commence à s’essouffler. La cadence étant sûrement infernale, les détails en pâtissent, mais sans gâcher outre mesure la lecture.

New Avengers (vol 3) #3 : Jonathan Hickman/Steve Epting


 Après un deuxième épisode passionnant, j’étais presque impatient de retrouver les Illuminati version Hickman. Toujours confronté à la problématique de la collusion interuniverselle, le groupe ressort un vieil artefact laissé en veille depuis The Heroic Age, rien de moins que le fameux Gant de l’Infini. Son exploitation me laisse un peu perplexe. Le Gant de l’Infini étant probablement l’arme la plus puissante de l’univers Marvel, je m’explique mal son épuisement énergétique au bout de quelques cases. Peut-être qu’Hickman a voulu rapidement écarter ce facteur de sa propre équation, mais cela sonne un poil faux. On sera en revanche plus satisfait des délibérations des Illuminati concernant les options alternatives aux gemmes cosmiques. Je ne vous dévoile pas les résultats du vote, mais concernant les orientations morales, on est plutôt surpris des positions de tel ou tel personnage. Reste que l’écrivain livre de superbes dialogues et se permet un nouveau cliffangher, logique, mais qui risque du coup de délier l’intrigue. Toutefois, on ne peut que saluer là encore le souci de la continuité en relation avec le nouvel édifice que met en place Hickman. Rien à signaler du côté de Steve Epting, qui est encore en grande forme. Les dessins sont beaux, et rendent honneur au caractère intriguant et solennel du script qu’il doit illustrer.

Secret Avengers (vol 2) #3 : Nick Spencer/Luke Ross


Rien à faire, pour moi la mayonnaise ne prend pas avec cette nouvelle mouture des Secret Avengers. Toujours aux prises avec l’AIM, nos agents secrets se font tout simplement chouraver l’armure du Iron Patriot. Concrètement, c’est à peu près tout ce qu’il se passe dans l’épisode qui recycle (encore) un élément récemment vu dans les films Marvel (même si le Iron Patriot découle du Dark Reign de Bendis). La lecture n’est pas une torture, mais elle est tellement anecdotique que j’ai dû à nouveau feuilleter ma revue pour me rappeler ce qu’il y avait dedans (et j’ai lu l’épisode hier…).

Young Avengers (vol 2) #3 : Kieron Gillen/Jamie McKelvie/Mike Norton


On est toujours en pleine course poursuite avec notre jeune couple accompagné de l’espiègle Loki. Encore une fois je n’ai pas grand-chose à écrire sur ce que nous offre Kieron Gillen. Le rythme est trépidant, le ton reste souvent léger (ce qui tranche un peu avec la réalité de la menace). A signaler tout de même l’introduction d’un nouveau personnage qui vient secourir nos héros en détresse. Plutôt bourrine et sarcastique, cette petite America Chavez (quel nom délicieux !) est une bonne composition. Sinon, il serait quand même temps de conclure cet arc, qui commence à être un tantinet longuet.


Bilan de la revue : Avengers reste une bonne lecture dont l’intérêt est principalement le fait des productions d’Hickman. Non pas que le reste soit une purge, mais cela reste quand même inférieur aux titres phares qui ouvrent le magazine.